Souvent terré dans son bureau, il est extrêmement difficile d'approcher Philippe et quand bien même vous parvenez à vous trouver en face de lui, lui arracher un mot relève du miracle. De prime abord, Philippe est un homme mystérieux qui vous lancera un regard hautain avant d'émettre un préjugé sur vous. Bouffit d'orgueil, le jeune homme adresse rarement la parole aux personnes qu'il juge étant inférieur à lui. C'est donc ainsi que le jeune homme mène une vie de solitaire endurci. Malgré son charme évident auprès des femmes, il n'en a que faire. Bien souvent ennuyé par les jérémiades de ces demoiselles, il fuit la compagnie des autres dès qu'il lui en a la possibilité. Mais cette attitude froide et hautaine cache une seconde nature. Cette première coquille qu'il offre au regard des autres n'est qu'une fine couche de protection et il est aisé de la briser lorsque avec un peu de courage on s'accroche à lui quitte à se faire rejeter un bon nombre de fois avant de voir le véritable Philippe apparaître. C'est alors un nouvel homme qui se présente à vous. Celui-ci est tendre, romantique, généreux, affectueux. Il ne demande qu'à être aimé sincèrement. Il ne demande qu'à connaître véritablement les liens de l'amitié. Il rigolera volontiers avec les personnes qu'il juge digne de son intérêt. Courageux lorsque l'occasion se présente, Philippe est l'homme des contes de fées, le prince charmant de ces demoiselles encore faut-il que ce monsieur trouve sa dulcinée à sauver. Passionné de lecture, il aura voulu mener une carrière d'écrivain ou de bibliothécaire mais l'ambition de son père fut plus forte et c'est ainsi qu'il devînt malgré lui général de divisions de l'armée. Pour pallier à ce manque dans sa vie, Philippe rédige tout les jours un petit journal dans lequel il libère ses pensées. Cependant c'est une carrière brillante que Philippe mène au sein de l'armée et même si ce n'est pas ce qu'il aurait souhaité en premier lieu il exécute son travail avec une rigueur propre à lui-même. Le jeune homme est doté d'une vivacité d'esprit inébranlable. Son point fort étant la stratégie, il est l'un des meilleurs conseillers d'Akira Tsukiyomi.

Il se fait tard, mon bureau est plongé dans une semi-obscurité à peine relevée par l'astre céleste qui brille dans le ciel. Je pose mon journal sur mon bureau et relève la tête. C'est alors que je croise mon reflet dans le miroir. Parfois, je me demande comment les gens font pour ne pas avoir peur de moi. J'ai le teint si pâle, si livide qu'on pourrait croire que je suis sans cesse malade à moins que l'on me prenne pour l'un de ces monstres germaniques que les légendes populaires aiment à appeler les vampires. Mes cheveux d'ébène prennent un étrange reflet bleuté à la tombée de la nuit, il sont touffus sur les côtés et très légèrement ondulés sur le dessus. J'ai l'impression de voir le visage de mon ancêtre ayant vécu à cette période si lointaine du XIXème siècle. Cela remonte à tellement longtemps. J'ai le même regard que lui. Des yeux en forme d'amande et des iris couleurs d'ambres. De mon regard s'échappe une douce luminosité, mon regard est constamment éclairé. Je ne sais s'il s'agit de l'intelligence qui se reflète dans mes iris ou bien d'une malice dont je n'arrive pas à me défaire. Mon visage est fin, presque féminin. Je n'hésite pas à le dire pourtant, on voit bien que je suis un homme. J'ai la mâchoire saillante, des traits réguliers et un visage bien dessiné. Mes lèvres sont fines et délicates et contrastent avec la pâleur de mon teint puisqu'elles sont aussi rouges que le sang. Je baisse mon regard vers le corps qui soutient cette tête sur ces deux épaules. Je suis grand, c'est indubitable. J'ai de larges épaules et je porte assez bien le costume. Je suis en revanche assez fin, je ne suis pas comme toutes ces armoires à glace pourtant je suis sans doute le seul à savoir que mon ventre est suffisamment musclé pour que je puisse me défendre tout seul. Je sais que j'ai une certaine grâce, une attitude impérial innée. La plupart des femmes que je croise me qualifient d'homme magnifique, de tombeur. Je ne vois pas pourquoi. Je me trouve fade, sans grand intérêt. Je n'ai pas ce teint éclatant de vitalité. Je n'ai pas ce regard ambitieux tourné vers l'avenir. Je n'ai pas ce sourire ravageur qui fait si bien fondre le coeur des demoiselles. Je n'ai pas la prétention de parler plus fort que les autres, de me mettre en avant. Je suis en général l'homme qui reste au fond de la salle et qui observe sans rien dire la société de ces bonnes gens. Je suis un être discret et pourtant on me qualifie d'être magnifique. Je suis las de mon reflet dans la glace. Prit d'un soudain excès de colère, je cache ce miroir sous un énorme drap blanc et me promet intérieurement de ne plus jamais le soulever.

Ainsi donc vous souhaitez que je vous relate mon insignifiante existence ? Certes, elle n'ai pas insignifiante et c'est avec une fausse modestie que je la qualifie ainsi mais elle n'ai pas plus brillante qu'une autre. Je n'ai pas beaucoup de mérite à vrai dire mais je vais laisser là mes jugements et vous laisser voir ceci par vous même.

Je suis né il y a de cela 24 ans, au mois de juin. Il faisait doux en cette période. Le temps se réchauffait, le soleil pointait le bout de son nez. Les arbres fleurissaient de nouveau à l'entour du manoir des De Baumont. Mon père, Wilfried, faisait les quatre cents pas dans le couloir du manoir en attendant que la bonne accoure vers lui en lui annonçant avec un sourire débordant mon sexe. Alors que ma mère avait travaillée toutes la nuit à son accouchement, je vint au monde vers 9h. Le soulagement de mon père s'ensuivit rapidement lorsqu'il apprit que j'étais un mâle. Dès lors, il avait de grands projets pour moi alors que je n'étais à ce moment là qu'un nouveau-né hurlant de tout son petit être.

Mon éducation commença assez tôt. J'avais déjà un objectif dans la vie, devenir général de l'armée tout comme mon père. J'étais un élève très studieux. Je ne prenais pas plaisir à tourmenter mes précepteurs comme la plupart des gamins nés dans le même milieu que moi. Ma préceptrice, Miss Eliott, était une petite femme chétive dont la gentillesse me faisait sourire sans discontinuer. Elle fut ma confidente tout au long de ma chère et tendre enfance. L'élève assidu que j'étais progressa rapidement au plus grand plaisir de mon père qui voyait déjà mon avenir tout tracé.

A l'âge de 15 ans, je m'enrôla dans la milice quittant à tout jamais les bras de Miss Eliott qui s'en alla dans une autre famille aider un autre enfant. A cet âge-là, j'étais déjà un homme. J'avais passé tous les tests de la milice haut la main faisant l'admiration de tous, provoquant la jalousie de certains. C'est à cet âge-là que je fit la rencontre de celui qui devint bientôt mon supérieur et ami, Akira Tsukiyomi. La rivalité n'exista pas entre nous deux dès lors que je savais quel poste je voulais obtenir et lui de même. Nous liâmes rapidement de puissants liens d'amitiés. Il fut mon seul ami et encore aujourd'hui je puis dire cela.

A l'âge de 20 ans, on m'accorda le poste de mon père. Me voilà devenu général de divisions de l'armée, le deuxième homme le plus important du régime. J'avais réussit ma carrière, fait l'admiration de mon père, la fierté de ma mère.